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Sel : Le bilan de la saison est bon

La saison de sel s'est terminée il y a peu, et les paludiers vont pouvoir souffler. Pour eux c'est le « Piwé », ou la « Piouée », impossible de retrouver l'orthographe de ce mot ancien, qui roule pourtant dans les bouches avec la saveur d'un bonbon, car, quelle qu'en soit l'orthographe, ça veut dire que le travail au marais est terminé et qu'est venu le temps du repos ou de la fête.
Guérande-infos est allé à la rencontre de deux paludiers afin de recueillir leurs impressions sur cette année particulière à bien des égards.

Antoine Dupin de Beyssat est paludier indépendant. Entre une multitude de choses restant à accomplir, il case un petit quart d'heure pour répondre aux questions. 

Quel bilan pouvez vous tirer de la saison ?

« C'était une bonne saison, assez dure car elle a commencé tôt. L'habillage* a été intense, on n'a pas eu de pause, on a commencé tôt à faire du sel, ça a été long. C'était bien, après les deux mauvaises saisons qu'on avait eues. Au moment de l'habillage, j'ai été blessé à l'épaule, j'ai commencé le 1er avril et j'ai commencé à faire du sel fin mai. Il y a eu une petite pause début juin et c'est parti à fond après. Je travaille à Saillé et à Batz-sur-Mer. Sur deux sites ça va. Trois ce serait trop, déjà on court. »

Est-ce que la saison est bien finie ?

« On doit encore terminer de trier la fleur**, ramener le « matos »***, il faut que je remette un peu d'eau sur le marais car il n'y a pas eu de pluie depuis un moment. Dans quelques oeillets il y a un peu de fleur, mais elle n'est pas très belle. Oui, la saison est finie. »

Quelle est la différence entre le travail d'un paludier indépendant et celui d'un coopérateur?

« Dans le travail, il n'y a pas de différence, c'est juste au niveau de la commercialisation. La différence c'est que je livre à des négociants, qui commercialisent. Je suis payé sur l'année. Donc les bonnes années, il faut savoir mettre de côté, pour les mauvaises. Au lieu de stocker du sel, je stocke de l'argent, j'essaie, pour pouvoir assumer les mauvaises années, vivre. »

 


Grégory Pitart est paludier adhérent à la coopérative de producteurs de sel « Les salines de Guérande », il y est aussi administrateur.

Quel est le bilan de cette saison 2010 ?

« La moyenne à l'œillet est au-delà de 2 tonnes pour le gros sel, ce qui en fait une saison loin d'être exceptionnelle, mais une bonne saison. En fleur on est au-delà de 100 kg à l'œillet, ce qui en fait aussi une bonne saison. Ce qui est remarquable, c'est que c'est une saison qui a été précoce, qui a commencé très tôt, fin mai. Ce qui n'a pas été simple à gérer, car on a eu la tempête Xynthia en fin d'hiver qui nous a bien mobilisés et bien fatigués, et on a pris du retard dans la préparation des salines. On a dû travailler plus pour rattraper ce retard. Ceci, ajouté à la saison précoce, qui a duré jusqu'à mi-août, on a eu beaucoup de fatigue. » 

Est-ce que c'est le pioué ? D'ailleurs comment ça s'écrit ?

« Oui c'est la piwé. Comment ça s'écrit ? Je ne sais pas trop, P.i.w.é. ? Mais oui, là c'est fini.(Il se lève pour vérifier la date dans son agenda), depuis la grosse pluie du 6 septembre. Après cette grosse pluie, il a fait très beau, ce qui a permis de rentrer le sel dans des conditions idéales. » 

Quelle est la différence entre un paludier coopérateur et un paludier indépendant ?

« Le mode de commercialisation. Chez les indépendants il y a celui qui stocke, celui qui en livre une partie et en stocke une autre. À la coopérative, l'année dernière avait aussi été une bonne saison. Deux bonnes saisons consécutives permettent de reconstituer des stocks et de garantir un approvisionnement continu de nos clients. Le stock permet de pallier les aléas du climat et aux fluctuations de rendement. 

Cette année ça a été à la fois très dur, mais la fin de saison est aussi tout à fait précoce. Aujourd'hui tout le gros sel est rentré, c'est assez rare, car on récolte souvent du sel dans la 1re quinzaine de septembre, parfois jusqu'à début octobre. Un point important aussi, c'est que cette année on a un sel d'une qualité assez rare. Les « chromas » (qui permettent de mesurer la blancheur du sel et de déterminer le taux d'insoluble) sont très bons, tant pour le gros sel que pour la fleur. On a rentré une proportion de « Label Rouge » nettement supérieure aux autres années. Le label rouge est un label officiel qui qualifie un sel de qualité supérieure. »

* habillage : travail de préparation du marais, remise en état des salines avant la récolte de sel.

** tri de la fleur : la fleur après avoir été récoltée, est triée avant livraison, afin de la débarrasser des moucherons ou petites graines qui peuvent s'être déposés sur les œillets, et pour que le consommateur ait un produit impeccable dans son assiette

***rentrer le matériel : après la saison les paludiers mettent leurs outils à l'abri, les las, lousses, brouettes. 

Auteur : MCE | 25/09/2010 | 2 commentaires
Article précédent : « Une entreprise qui ne connaît pas la crise. »

Vos commentaires

#1 - Le 07 octobre 2010 à 08h13 par albani, Dijon
je cherche des livres sur les paludiers de guerande : romans ou livre ethnographique ;pouvez vous m indiquer svp ? merci d avance
#2 - Le 08 octobre 2010 à 18h45 par media-web
Un beau livre cette année : Les marais de la presqu'île Les moissonneurs du sel Brice Caharel et Armel Jorion Delbos. Editions CPE

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